Pour la première fois en France, le point de vue de Yásnaya Elena Aguilar Gil en tant qu’autrice, traductrice, linguiste, chercheuse et militante des droits humains est accessible aux éditions Ici-bas avec ce recueil de ses articles publiés dans des revues et des journaux comme El País. Née à Ayutla Mixe dans l’État d’Oaxaca, au sud du Mexique, c’est à partir de son lieu d’origine et de son identité mixe que Yásnaya Elena Aguilar Gil analyse l’iniquité de l’organisation sociétale autour du concept État-Nation qui vise à acculturer la diversité des expressions et manifestations culturelles sous les traits d’une population dominante au pouvoir.

Plutôt que l’identité d’indigène ou encore pire d’indien imposée uniformément de l’extérieur dans une grille d’analyse oppressante, Yásnaya Elena Aguilar Gil développe l’idée que chaque nation a le droit à son autodétermination sans passer par l’ethnocide de l’intégration de force à une langue, des symboles et des valeurs communes selon la logique du colonialisme et du patriarcat. Ce phénomène n’a pas seulement lieu au Mexique où la diversité culturelle s’efface au rythme de la folklorisation et de l’appropriation culturelle au nom d’un système étatique éradiquant toute alternative au fonctionnement déshumanisé, puisqu’on le retrouve dans de nombreux pays dont la France qui a vu disparaître la force d’appréhension du monde que faisait vivre chaque régionalisme, au nom de la sacro-sainte et inquisitrice homogénéisation républicaine.

Nous sans l’État rappelle avec force une donnée fondamentale : les États-nations modernes ont façonné leur politique d’oppression des peuples par le croisement de logiques capitalistes, patriarcales et coloniales.

Cette parole située nous invite, chacun depuis nos géographies, à décoloniser nos imaginaires pour une émancipation définitive et globale.